dimanche 31 octobre 2010

Keats Island ou l'île fantôme

Il était une fois, un mois en arrière, je me souviens...

En ce dernier week end de Septembre, il fait miraculeusement BEAU. Les sacs bouclés, ni une ni deux, nous nous hâtons à HorseShoe Bay, le port principal de Vancouver Ouest qui connaît une affluence considérable à chaque fin de semaine. Les Vancouverois ont le goût de l’évasion dans la peau, d’autant qu’ils jouissent d’un vaste choix parmi les innombrables îles du Golf, ce qui leur donne naturellement l’élan de s’exiler chaque fois que l’humeur du ciel s’y prête. Certaines de ces îles, d’une taille insignifiante, et conséquemment peu fréquentées, attirent des jeunes femmes affamées de vie sauvage à l’état pur comme nous autres…


Nous voici donc à bord d’un taxi de mer, les dos chargés et les pieds chaussés, fonçant droit en direction de Keats Island, l’une des plus petites îles du Détroit de Howe, nichée sur la péninsule de la Sunshine Coast ou « Côte ensoleillée » que les résidents de la Colombie Britannique affectionnent probablement autant que les Français chérissent leur Côte d’Azur...


Lorsque la navette nous dépose à notre point d'arrivée, nous nous rendons compte que nous sommes les deux originales à échouer sur cette petite île si peu visitée et méconnue tandis que les autres passagers poursuivent leur traversée...et à ce point de notre parcours, nous sommes encore bien loin de nous douter de ce qui nous attend sur place...l'inconnu meuble notre imaginaire...


Les pieds de nouveau sur la terre ferme, nous sommes saisies par une agréable sensation de béatitude à la vue de ce qui nous entoure...A mesure que nos pas nous enfoncent sur l'île, nous découvrons des petits chemins de terre gravillonnés, des habitats d’un style typiquement canadien tel qu’on les imagine, enfouis dans les bois, sous d’épais feuillages...des maisons, des chemins, des bois, toujours ce décor et pas une seule présence humaine… bon je vous le concède, nous avons peut-être croisé un homme dans une voiture de golf avec son chien, de passage ponctuel sur l'île, mais tout de même, quel sentiment d'abandon...


Aurions-nous atterri sur l'une de ces îles désertes, qui sont couramment évoquées dans la littérature et dans l'imagination populaire, comme un lieu ou des individus se retrouves naufragés ou bloqués, coupés de la civilisation? Quelles que soient les constatations (pas de source d'eau potable, pas d'épicerie, pas de rien du tout), il est trop tard pour reculer. Alors, promenons-nous dans les bois, pendant que le loup n'y est pas...



Sur notre chemin, nous découvrons une étrange construction dont les fondements atypiques sont dévoilés en toute transparence...



Il suffit de se retourner pour jouer à se donner des vertiges....


Des ors qui se donnent
Au vert qui s'estompe

Dans un concert harmonieux



Shut... c'est beau...et lorsque c'est beau, on ne dit pas "c'est beau", on se tait pour admirer...



Et tout à coup, elle reprend son récit...
Nous poursuivons notre marche, guidées par des indications vagues et parfois trompeuses laissées par nos précédents : rubans de couleur suspendus aux branches, panneaux sens dessus dessous et notre randonnée devient une véritable course d'orientation tant nous peinons à déterminer le parcours à suivre. Pendant ce temps, l'orchestre de la vie animale nous étourdit. Plongées dans l'univers fantastique de la vie sauvage, nous savourons chaque coup de pinceau donné à ce tableau vivant. Mais aussitôt, la réalité nous rattrape, et très vite, l’inquiétude prend le dessus lorsque nous nous rendons compte que nous sommes sans doute les seules intruses venues agiter le calme de cette forêt profonde.


Entre doutes et espoirs, nous finissons par arriver à destination.
Le bout de terrain où nous avons choisi de piquer notre tente nous donne un accès privilégié à la plage par un petit escalier.


Nous tâtons les lieux de notre installation, éprises par la beauté de ce paysage qui nous appartient le temps d'une journée...d'une
nuit...


Le soleil irradie son doux visage et lui donne des airs d'ange...


Sur la plage abandonnée...



La civilisation surgit pour capturer la nature en y apportant son oeil photographique et ainsi la magnifier...



Assises aux premières loges sur une bûche de bois face à la mer, nous nous délectons devant le spectacle d'un paysage qui se métamorphose sous nos yeux jusqu'au coucher du soleil...



A la nuit tombée, après avoir soupé devant un feu que, je dois vous l'avouer, en campeuses débutantes, nous sommes parvenues à allumer non sans mal, nous nous réfugions sous notre toile "sans frontières", sous les étoiles, en nous souvenant que c'est pour vivre ces moments pleins de charme que nous avons choisi le Canada. Mais dans les plus belles descriptions de ce pays, il y a peut-être un petit détail que nous avons omis : la faune sauvage.
Tout à coup, au beau milieu de la nuit, des pas lourds, non-identifiés se sont enfoncés dans le sol, rodant insistemment autour de notre tente. Terrorisées et imaginant déjà le pire scénario, nous nous projetons soudain dans un best of des films d'épouvante.


Après la toile sans frontières, peut-être louerons nous un bateau pour notre prochain voyage, afin d'explorer les joyaux inaccessibles de ce détroit à la beauté inaltérable...



Promenons-nous dans les bois, pendant que l'ours n'y est pas...


Alors que les réserves en eau se sont épuisées et que les gorges se sont asséchées après une marche bien soutenue, nous apercevons au loin une hypothétique chance de ressourcement, que nous n'allons pas laisser filer. Hallelujah!


Le temps c'est de l'argent. Moralité : la limace dort à la rue parce qu'elle en a trop perdu :)



Voyage dans le cerveau de la mouette : "Ben lô! Le loyer n'est pô ben dispendieux, pis la vue est sublime, c'est icitte que s'ra ma nouvelle maison".


"Toute bonne chose a une fin, et c'est p'tet ça qu'est bien". (Mano Solo), au revoir île indomptée et merci pour ces beaux moments d'oubli...

1 commentaire:

  1. Bravo jenny pour ta prose, c'est ben poétique!!!
    je t'envoie des gros bisous de chez nous, tu écris vraiment très bien, l'aventurière!

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